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: Quel impact aurait la « vague bleue » sur les grands secteurs de l’économie ?

By Peter Rosenstreich
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Une vague bleue pourrait bien déferler sur l’économie américaine lors des élections présidentielles. Le pays tout entier retient son souffle dans l’attente des résultats de ce scrutin, même si les sondages indiquent que les démocrates représentés par Joe Biden pourraient bien tout rafler : la Maison-Blanche et les deux chambres du Congrès. Si ces sondages s’avèrent exacts, les marchés doivent se préparer à des changements législatifs qui se répercuteront sur les entreprises mondiales.

Cela étant, nous ne sommes pas là pour nous risquer à des prédictions sur l’issue des élections, mais pour analyser les conséquences éventuelles de cette vague bleue sur les marchés intérieur et international. Nous savons par expérience que les évènements politiques entraînent systématiquement des fluctuations sur le marché boursier. Par conséquent, nous tenterons de prévoir les effets que l’issue de ces élections aura sur différents secteurs et entreprises et donc sur les portefeuilles d’investissement.

Avant de nous plonger dans cette analyse, nous invitons les investisseurs à la prudence et tenons à leur rappeler qu’il existe une grande différence entre une campagne électorale et la législation qui en découle. En effet, les nouveaux présidents ne tiennent pas toujours les promesses faites durant la campagne. Les investisseurs doivent donc analyser eux-mêmes chacune des variables potentielles avant d’apporter quelque modification que ce soit à leur portefeuille.

Dans cet article, nous examinerons les changements susceptibles de se produire et leurs effets sur les entreprises mondiales dans cinq secteurs clés, à savoir l’environnement, la fiscalité, le travail, le pétrole et le commerce.

Environnement

Si Joe Biden remporte les élections, les enjeux environnementaux que le Parti démocrate considère comme prioritaires auront des répercussions significatives sur les marchés. Durant la campagne, le candidat démocrate a annoncé que des changements majeurs seraient apportés à la politique environnementale avec l’instauration de taxes liées au climat et de droits de douane sur les produits à forte intensité carbone. Alors que les sondages donnent une large avance à Joe Biden depuis le débat présidentiel organisé le 29 septembre, l’indice MSCI Global Alternative Energy surperforme déjà nettement les valeurs traditionnelles de l’énergie.

Cependant, si les sondages se trompent et que le Parti républicain conserve finalement le contrôle du Congrès, les propositions de réformes de la législation climatique ont très peu de chances d’aboutir. Par conséquent, les valeurs alternatives mondiales du secteur de l’énergie qui ont déjà rebondi pourraient voir leurs bénéfices chuter lourdement, et les investisseurs pourraient donc essuyer des pertes importantes.

Fiscalité

Les actions risquent d’être pénalisées à court terme en cas de victoire du camp démocrate. À en croire le programme de Joe Biden, les impôts sur les sociétés devraient augmenter, et le taux d’imposition des multinationales basées aux États-Unis devrait passer de 21 % à 28 %. Pour les entreprises concernées, cette hausse de 7 points de pourcentage pourrait se traduire par une baisse des bénéfices après impôts de 10 %. Une fois encore, cette pression fiscale pourrait faire chuter les cours des actions.

Travail

Le coût du travail joue un rôle central dans l’économie, car il contribue à déterminer les marges bénéficiaires des entreprises et a donc une incidence sur le revenu national.

L’une des propositions de Joe Biden consiste à favoriser les travailleurs au détriment des actionnaires et à accroître la participation de la main-d’œuvre au revenu national. Le candidat démocrate veut donner plus de poids aux travailleurs et augmenter leur pouvoir d’achat. S’il y parvient, l’économie américaine devrait changer d’orientation pendant les dix années à venir, et la part du revenu du travail dans le revenu national devrait remonter après avoir atteint son niveau le plus bas depuis 70 ans.
Si ce revirement de tendance venait à se matérialiser et que le coût du travail augmentait aux États-Unis, les entreprises américaines pourraient voir leurs bénéfices se replier par rapport à leurs concurrents internationaux.

Combustibles fossiles

Un changement à la tête des États-Unis ne sera pas non plus sans conséquence pour le marché mondial du pétrole. En cas de vague bleue, il faudra s’attendre à certaines évolutions qui se répercuteront sur les compagnies pétrolières nationales.

Les États-Unis réintégreraient l’accord de Vienne sur le nucléaire iranien signé en 2015 et reprendraient part aux négociations de suivi. Après le retrait de l’administration Trump de l’accord en 2018, cela représenterait un gros défi pour le gouvernement Biden (s’il est élu). L’ambassadeur iranien a déclaré au Royaume-Uni que Joe Biden devra regagner la confiance de l’Iran en menant des négociations pragmatiques.

La proposition de Biden pour empêcher l’Iran d’enrichir de l’uranium pourrait se traduire par l’arrivée sur le marché d’un million de barils de pétrole iranien supplémentaires par jour. Cela aurait pour effet de tirer les prix du pétrole vers le bas et pourrait peser sur les performances boursières des compagnies pétrolières.

Commerce

Les États-Unis ont déjà renégocié des accords commerciaux avec quatre de leurs partenaires : la Chine, le Mexique, le Japon et le Canada. Qui plus est, deux nouveaux accords commerciaux devraient être conclus avec l’Union européenne et le Royaume-Uni en 2021.

Bien que l’administration Biden soit certainement déterminée à finaliser ces accords le plus rapidement et le plus facilement possible, il lui faudra probablement plus de temps qu’au gouvernement Trump s’il était réélu pour conclure un accord de libre-échange avec le Royaume-Uni.

La guerre commerciale sino-américaine s’éternise, au détriment de certaines entreprises chinoises. L’administration Biden opterait pour une approche multilatérale plutôt qu’unilatérale, ce qui devrait donner lieu à un processus de résolution plus transparent, mais aussi plus lent. En cas de victoire démocrate, il faudra également s’attendre à ce qu’une place plus importante soit accordée à l’environnement et au travail. Par ailleurs, il y a fort à parier que le gouvernement Biden se montrerait plus coopératif pour tenter d’influencer le comportement de la Chine.

La COVID-19 a de toute évidence constitué le principal facteur des performances économiques et du marché boursier cette année. Cela étant, une approche commerciale multilatérale fondée sur une politique américaine moins agressive pourrait permettre de réduire la volatilité des marchés, notamment pour les entreprises qui dépendent à la fois des États-Unis et de la Chine.

Les changements de présidence ont toujours une incidence sur les marchés et sur l’économie. Mais cette fois-ci, l’arrivée de Biden au pouvoir pourrait aussi se répercuter sur les investisseurs. La hausse du coût du travail et des impôts associée à la diminution des droits de douane et au renforcement des mesures de relance budgétaire marquerait l’entrée dans un environnement réglementaire coûteux et difficile pour les entreprises américaines.